Quand il s’agit d’innovation, les entreprises peuvent être constamment menacées par la rigidité fonctionnelle et d’autres biais cognitifs qui poussent les personnes à ignorer les solutions positives, parfois cachées à première vue. Nous passons des années à étudier la construction de designs innovants qui peuvent améliorer ce qui est habituellement caché. Des techniques et des outils ont été identifiés pour surmonter les pièges cognitifs et résoudre les problèmes de manière innovante – de la création de nouveaux produits, en passant par des nouvelles applications de produits existants, jusqu’à l’anticipation des menaces de la concurrence.
L’utilisation de ces outils ne requiert pas de talents particuliers ou de grandes spécialisations de créativité; utilisés ensemble, ils sont un moyen simple et low-cost de stimuler l’innovation.
Pour mieux comprendre, prenons comme exemple le naufrage du Titanic qui a eu lieu le 14 avril 1912.
Si vous demandiez à un groupe de cadres, y compris de managers créatifs et de marketers, d’élaborer des scénarios innovants qui permettraient de sauver les passagers du Titanic, il est probable qu’ils « souffriraient » du même aveuglement ou du même handicap qui ont touché tous les membres de l’équipage à l’époque. Cela est dû à un biais commun que nous appelons la rigidité fonctionnelle qui nous limite à regarder un objet ou une situation toujours de la même manière dont il est communément utilisé ou représenté.
Dans le contexte nautique, un iceberg est un danger à éviter pour tout l’équipage, il est donc très difficile à première vue de le voir autrement.
Rigidité fonctionnelle | Mais qu’est-ce qui provoque vraiment cette rigidité fonctionnelle?
Quand nous regardons un objet ordinaire, nous choisissons consciemment et de façon automatique un ensemble de caractéristiques qui ne sont pas importantes pour son utilisation. Cette tactique neurologique efficace de notre quotidien est en réalité un grand ennemi de l’innovation! En effet, diviser ou décomposer un objet en plusieurs composants peut faire redécouvrir de nombreuses et nouvelles utilisations pour ce même l’objet.
Changer la façon dont l’objet est décrit est un moyen de surmonter cette difficulté. Cette technique de pièces génériques est une systématisation pour changer la façon dont nous décrivons les objets, en évitant d’«enfermer» la conception préalable des personnes, en ouvrant leurs esprits à de nouvelles idées et usages.
Rigidité du design
Pourquoi, lorsque nous présentons un produit qui existe déjà, et demandons à ce qu’un nouveau design soit créé, les personnes ont tendance à se fixer sur les caractéristiques du design actuel? Pour parvenir à une véritable innovation, nous avons besoin de manipuler les caractéristiques auxquelles la plupart des personnes ne prêtent pas attention et négligent à première vue.
Mais comment y parvenir?
Comme les pilotes d’avions qui font des check-lists longues et détaillées pour garantir qu’il ne leur manque aucune étape essentielle dans la préparation de leur vol, nous pouvons créer une check-list des types de caractéristiques du produit que les personnes ont tendance à négliger la plupart du temps et qui sont importantes pour les nouveaux projets d’innovation.
Ainsi, les équipes d’innovation peuvent consulter la liste qui va les pousser à tenir compte des caractéristiques qui seraient probablement oubliées tout en économisant du temps et efforts et éviter la frustration.
La rigidité de la définition des objectifs
La description de l’objet, en général, conditionne et emprisonne la pensée des gens. Caractériser le problème d’une manière plus générale peut aider à surmonter cette difficulté. Cependant, la complexité réside précisément dans la définition de ce qui constitue une description plus générique de l’objectif. Une encyclopédie peut être une bonne ressource, car elle présente une structure hiérarchique explicite et identifie des homonymes pour chaque terme.
Les mots d’action, qui sont au centre de la plupart des objectifs, ont souvent de nombreux homonymes et chacun d’eux met en évidence une manière spécifique pour atteindre cet objectif. Par exemple, il y a plus de 170 homonymes du mot « supprimer », et près de 50 pour «guider» et plus de 40 pour « transporter ».
Il est certain qu’un objectif est composé de bien plus qu’un simple verbe. Le verbe exprime le changement qui est recherché, mais les noms définissent ce qu’il est nécessaire de changer et les prépositions indiquent les contraintes importantes et les relations entre les choses. Pour résumer, d’une manière générale, quasiment tous les objectifs sont constitués par un verbe, un nom et une préposition.
Essayez donc de définir vos objectifs! Vous pouvez trouver plusieurs approches pour résoudre votre problème de manière simple et à faible coût.
Visualiser la pensée innovatrice
Au premier abord, la résolution de problèmes consiste à mettre en relation deux activités: la définition des objectifs, d’une part, et la combinaison de ressources pour l’atteindre, d’autre part.
Chaque variation de l’objectif et chaque découverte d’une nouvelle caractéristique d’une ressource disponible jusque-là jamais identifiée peuvent suggérer un chemin différent et alternatif à suivre. Cette approche implique la cartographie des relations entre toutes les possibilités, dans un graphique simple ayant quelques similitudes avec un arbre de décision.
En haut on met l’objectif et en bas on indique toutes ses variations possibles. Les ressources disponibles sont distribuées à la base du graphique, avec les caractéristiques respectives identifiées qui pointent vers le haut (objectif). Lorsque les deux vecteurs se rencontrent, cela signifie que nous avons trouvé un chemin possible, une solution. Cette solution peut elle aussi être travaillée à travers différentes directions et avec des visions complémentaires.
Une approche efficace et alternative au brainstorming habituel est celle que l’on désigne par « brainswarming » – un clin d’œil à la notion d’intelligence collective.
Pour comprendre comment cette approche fonctionne, reprenons l’exemple du Titanic. Commençons avec l’objectif de «sauver les passagers ». Les ressources les plus évidentes sont les «canots de sauvetage ». L’application la plus simpliste des ressources existantes est de « mettre les gens dans les canots de sauvetage. »
Ensuite, nous identifions différentes manières d’exprimer l’objectif afin de susciter des solutions alternatives. Par exemple, des objectifs légèrement différents peuvent être «garder les personnes au chaud et en train de respirer» et «garder les personnes hors de l’eau». Voyons plus en détail l’objectif «garder les personnes hors de l’eau ». Une des possibilités est de réussir à mettre les personnes sur un matériau flottant – pas forcément des canots de sauvetage – ce qui peut déclencher un examen plus complet des ressources disponibles. Cela peut, par exemple, rappeler que le bois est un matériel flottant, suggérant que les tables en bois peuvent être utiles. Des planches ou même des portes peuvent être placées entre les canots de sauvetage pour maintenir les personnes hors de l’eau.
En élargissant davantage la portée de l’analyse, l’idée de construire une plate-forme flottante de fortune à partir de troncs attachés entre eux peut surgir – ce qui pourrait être suffisant pour supporter directement le poids de plusieurs personnes ou même servir de fondation à une plateforme supplémentaire faite de planches de bois plus sûre.
On estime qu’il y aurait à bord plus de 40 voitures. En d’autres termes, cela signifie l’existence de 160 pneus et chambres à air (pour ne pas mentionner les roues de secours) disponibles! Des quantités suffisantes, donc, pour construire un radeau flottant qui pourrait supporter davantage de planches de bois. Outre tout cela, l’iceberg en lui-même est une plate-forme flottante géante!
Malheureusement, dans la nuit du 14 Avril 1912, aucune de ces idées n’aurait pu fonctionner, en particulier parce qu’il a fallu trop longtemps pour que les personnes se rendent compte de l’ampleur du danger qu’elles couraient.
Le but de cet exercice n’est pas de trouver la solution idéale ; mais plutôt, de démêler tous les liens possibles entre l’objectif et le maximum de caractéristiques possibles des différentes ressources disponibles, de sorte que nous puissions voir au-delà de ce qui est naturellement évident.
Ainsi, l’objectif du graphique de brainswarming est de décomposer le processus de résolution de problèmes jusqu’à obtenir les composants les plus élémentaires et démontrer comment ils sont tous interrelier. Les personnes n’ont pas besoin de se rappeler de tous les composants qui peuvent être en cours d’analyse, car elles arrivent facilement à les identifier visuellement sur le graphique. Cette approche démystifie certains des composants de l’innovation. La façon la plus simple et la plus facile de favoriser l’innovation est de rapporter à l’équipe d’innovateurs ce qui pourrait être négligé et qui est généralement juste en face de leurs yeux!